Stéphane Lecorney : au coeur de l’empreinte environnementale du numérique
Stéphane Lecorney nous permet un retour sur son profil de collaborateur au sein du Media Engineering Institute. Polyvalent, engagé dans l’écologie et doué d’une sensibilité environnementale, Stéphane est capable de mener avec brio des projets complexes et ambitieux.
Il permet ainsi à son équipe de profiter d’une vision globale de notre empreinte numérique et de prendre conscience d’enjeux insoupçonnés mais cruciaux pour notre société.
Découvrez ou redécouvrez Stéphane, sa vision et son travail au travers de cette interview, qui vous permettra également d’en apprendre plus sur le MEI et ses projets !
Peux-tu décrire ton poste au sein du MEI ?
Je suis chargé de Recherche Appliquée et Développement (Ra&D) au sein de l’institut. Grâce à mon expérience de 15 ans en développement logiciel, principalement web et mobile, je soutiens les professeurs lors de la création de projet Ra&D pour le cahier des charges et l’estimation technique. Lors de la réalisation des projets, je participe au développement, au suivi des projets et à l’encadrement de l’équipe de développement du MEI.
J’ai toujours aimé travailler dans des start-up proches des nouvelles technologies et dans de petites équipes.
Quel est ton parcours ? Quels domaines te tiennent à cœur ?
Après mon diplôme d’ingénieur de l’IMT Atlantique, j’ai travaillé dans plusieurs start-up en Suisse (Visiowave, Ozwe et routeRANK) dans le domaine de la vidéo, du mobile et du web.
J’ai toujours aimé travailler dans des start-up proches des nouvelles technologies et dans de petites équipes. Les débuts du développement sous iOS par exemple lors de la sortie de l’iPhone puis de l’iPad ont été une période vraiment très dynamique et passionnante avec de nouveaux langages et type de développement à découvrir.
Je suis également très sensible à l’incidence du numérique sur l’environnement et les opportunités d’améliorer notre impact environnemental grâce à de nouveaux outils. C’est en particulier ce que je faisais au sein de routeRANK en créant un planificateur multimodal qui permet d’encourager une mobilité plus respectueuse de l’environnement.
Durant ton parcours professionnel, quel projet t’a le plus passionné, et pourquoi ?
J’ai été passionné par les projets au sein de routeRANK autour d’une mobilité plus moderne et écologique. L’idée d’une mobilité multimodale ou de la mobilité en tant que service (mobility as a service) était encore précurseur il y a quelques années. C’était particulièrement motivant de travailler sur des technologies et usages nouveaux. J’aime le challenge de travailler à la frontière de la recherche et de mettre à disposition de nouveaux services. Lorsque ces services permettent en outre d’avoir un impact positif sur l’environnement, je trouve cela encore plus valorisant. CommuteRANK est un de ces projets qui permet d’encourager la mobilité douce et les transports publics pour les trajets pendulaires.
D’où te vient ton intérêt pour les thématiques en lien à l’écologie ?
En 2004, au cours d’un échange d’études en Finlande à la Tampere University of Technology, j’ai eu une prise de conscience face à l’importance de la nature. La Finlande avait une avance notable sur le tri sélectif comparé à des pays tels que la France. Le tri des ordures ménagères est pratiqué depuis plus de 20 ans et 80 % des emballages sont réutilisés. C’est ensuite au travers de différentes rencontres que je me suis progressivement investi et engagé dans la cause écologique.
Selon toi, quelle problématique mériterait d’être résolue par des outils issus de la Ra&D ?
Une des plus grosses problématiques à mes yeux reste le réchauffement climatique. Ou plus précisément, le dérèglement du climat, le premier terme étant trompeur.
J’ai la sensation que l’on arrive au bout des tentatives de sensibilisation de la population dans de nombreux domaines. Se contenter de petits gestes n’est plus suffisant, des changements politiques majeurs ou de véritables initiatives sont désormais indispensables. Cela me fait penser au projet CarbonViz, dont l’objectif est de nous rendre attentif à notre empreinte numérique et d’être plus responsable avec l’arrivée d’innovations telles que la 5G.
Les technologies numériques dans leur ensemble ont un impact non négligeable sur le réchauffement climatique.
Que représente ce projet CarbonViz pour toi ?
CarbonViz est actuellement le projet qui me tient le plus à cœur étant lié à l’empreinte environnementale du numérique. L’idée est venue au Professeur Laurent Bolli au moment où je me posais la question de l’impact de ma vie numérique après avoir lu plusieurs articles contradictoires dans la presse. Les technologies numériques dans leur ensemble ont un impact non négligeable sur le réchauffement climatique. Je trouve donc très utile de pouvoir contribuer à la réduction des émissions de CO2 liées à leurs usages. Il me semble également indispensable d’apporter plus de clarté et d’objectivité dans les questions d’une telle importance. C’est ce que nous pouvons faire grâce à notre statut d’institut de recherche académique sans être dépendant de clients externes ou de vendre un produit.
Que manque-t-il aujourd’hui dans notre société ?
La sobriété numérique, car tous les usages ne se valent pas. Par exemple, en période de COVID, nous avons réalisé que la diffusion de cours en ligne et de streaming vidéo a explosé. Cependant, l’empreinte énergétique de ces activités est inégale. La diffusion de contenu en 4K au travers d’une plateforme telle que Netflix a un impact colossal comparé à la consultation de ces cours en ligne. Cela implique une plus grande quantité de données à stocker et transférer; et donc une bande-passante plus importante. Cela nous a conduit à rencontrer une situation inédite : devait-on limiter la bande-passante des plateformes de streaming pour les autres usages tels que les cours universitaires, visioconférences, (etc.) ?
Les données sont le plus souvent invisibles pour le consommateur.
Un autre exemple concret concerne la taxation des données mobiles : nos abonnements internet, qu’ils soient pour notre ménage ou nos smartphones sont de plus en plus souvent illimités. Il devient difficile pour un usager d’estimer la quantité de données qu’il utilise ou consomme chaque mois, alors que chaque gigaoctet utilisé était monitoré avec précaution il y a quelques années. Nous sommes tous attentifs aujourd’hui à couper l’eau après s’être lavé les mains, une prise de conscience pour l’impact de la consommation de données est nécessaire. Et certainement difficile, les données étant le plus souvent invisibles pour le consommateur. Comment pourrait-il alors savoir qu’il doit fermer le robinet ? C’est justement pour cela que nous avons conçu CarbonViz.
Sur quel autre projet travailles-tu en ce moment ?
Smapshot qui permet de géoréférencer des images de paysages à caractère historiques issus de collections d’archives sur un globe 3D. Des centaines de milliers d’images de collections du canton de Vaud, de l’ETHZ ou de swisstopo ont déjà été géolocalisées par des volontaires. Nous sommes actuellement en train d’élargir le projet avec plusieurs partenaires tels que l’Autriche, Rio de Janeiro ou la Rice University au Texas. Nous avons également travaillé avec l’institut des données géographiques suisse pour mettre le code en Open Source et rendre ce projet encore plus accessible grâce à une API publique.
En tant qu’ingénieur logiciel et développeur, quels sont les enjeux du développement web et mobile dans le contexte (technologique, social, …) actuel ?
Je pense que le réchauffement climatique et les problèmes environnementaux de manière générale (perte de biodiversité, etc.) représentent les enjeux majeurs auxquels nous devons faire face. Dans ce contexte, les technologies de l’information ont un grand potentiel pour monitorer ces problèmes et ainsi mieux agir dessus. Plusieurs projets de l’institut sont en lien avec ceci, que ce soit sur l’empreinte du numérique, la biodiversité ou l’économie sociale et solidaire.
Article original par Romain Sandoz, complété et réarrangé par Alexandre Pinault.
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